Dans la relation intime, pourquoi les adolescents doivent savoir exprimer leur consentement ?
L’évolution législative récente en France sur le consentement sexuel intègre explicitement la notion de consentement dans la définition pénale du viol. Adoptée à l’Assemblée nationale en avril 2025, cette réforme définit le viol comme « tout acte sexuel non consenti » et précise que le consentement doit être libre, éclairé, spécifique, préalable et révocable. Elle précise aussi que le consentement ne peut être déduit du silence ou de l’absence de réaction de la victime, et qu’il n’y a pas de consentement si l’acte est commis avec violence, contrainte, menace ou surprise, des critères déjà dans le Code pénal.
Rencontre avec Nathalie Raimon
Chargée de projet à Promotion santé pôle Vendée
- Comment expliquer le consentement à des adolescents ?
« Le consentement c’est une notion qui évolue tout au long de la vie. Il faut apprendre très tôt à l’enfant à exprimer ses choix : tu veux le t-shirt rouge ou le bleu ? C’est toi qui choisit. Apprendre à l’enfant à formuler ce qu’il veut, ce qu’il aime où qu’il n’aime pas, c’est un apprentissage dès l’enfance.
L’adulte a tendance à penser que le consentement, c’est oui ou non. Or le consentement c’est plus souvent oui mais ! ce n’est jamais un oui définitif, cela dépend ce qu’on me propose. Il faut que la proposition soit claire et éclairée, donc il faut être en capacité de poser des questions, de clarifier la situation. Il s’agit de savoir dire ce que l’on cherche et ce que l’on veut pour que l’autre comprenne. C’est l’exemple de la tasse de thé, il s’agit d’un choix à un moment donné avec l’envie du moment, c’est un choix qui peut changer. Le consentement est réversible. Il n’y a pas forcément de pression et de violence dans le non consentement, il y a quelqu’un qui hésite à poser un vrai oui ou un vrai non et quelqu’un qui en profite ou qui fait en fonction de son désir. Donc il faut appendre aux enfants ou aux adolescents à dire non. L’enfant n’est pas obligé d’accepter un bisou pour dire bonjour, ce n’est pas une obligation, il y a d’autres manière de se dire bonjour ».
- Que faire pour l’expression d’un consentement éclairé ?
« Il faut s’écouter, faire des choix, demander clairement, rester soi-même, dire ce que l’on veut ou ne veut pas, écouter, respecter les besoins et les réponses des autres, accepter les désaccords, et aussi avec les adolescents : déconstruire les mythes sur la sexualité (et les stéréotypes).
Un moyen mnémotechnique sur le consentement (tiré du jeu pédagogique Jdiwi Jdinon) : Les ouis doivent être RÉELS
- R (réversibles : jamais définitif)
- E (éclairés : on sait tous de quoi on parle)
- E (enthousiastes : on a tous envie)
- L (libres : en conscience, sans pression, sans manipulation)
- S (spécifiques : à un moment, une personne, un contexte...)
Et une phrase importante : Non veut toujours dire non et l’absence de non ne veut pas dire oui »
Le Conseil départemental de la Vendée et la Maison de protection des familles de la gendarmerie de Vendée ont mis en place une action originale sur le consentement pour les élèves de 4ème et 3ème dans le cadre des séances EVARS (Espaces vie affective, relationnelle et sexuelle).
Témoignage croisé de Karine Geron, l’Adjudant chef Vergeade et l’Adjudante Fekeke du groupement de la gendarmerie de Vendée
- Pourquoi une action du Département sur le sujet du consentement ?
Karine Géron, Réferente Action sociale du département de la Vendée en charge des missions sur la lutte des violences intra familiales et la prostitution des mineurs.
« L’action du Conseil départemental dans la lutte contre violences intra familiales s’adresse à tous les publics, les femmes, les enfants, les personnes en situation de handicap ou en perte d’autonomie et aussi les hommes. Nous travaillons beaucoup avec les enquêteurs de la Maison de protection des familles, ce sont les gendarmes qui font les auditions des mineurs en cas de violences et notamment d’agressions sexuelles. Le constat est qu’il y a de plus en plus de situations où le consentement est interrogé. Cette notion peut paraître un peu nébuleuse pour certains jeunes. Un premier rapport intime peut être mal vécu parce que le consentement n’est pas clairement énoncé ».
Adjudante cheffe Vergeade de la Maison de protection des familles
« Dans chaque département, une unité nommée « Maison de protection des familles » pour traiter des violences intra-familiales a été créée. On remplit des missions de prévention, de protection, et d’appui judiciaire (concours aux enquêteurs judiciaires de département pour procéder aux auditions de mineurs victimes de violences sexuelles ou de violences physiques). En matière de protection, on assure un suivi de toutes les violences intra-familiales sur le département, on reprend contact avec toutes les victimes pour orienter vers des partenaires : associations d’aide aux victimes pour répondre aux situations. La partie prévention, c’est de l’animation pour intervenir dans les établissements scolaires, ce projet s’inscrit dans cette mission.
Dans nos auditions, nous rencontrons beaucoup de jeunes filles entre 12 et 17 ans qui ne sont pas bien psychologiquement, car elles sont persuadées d’avoir été victimes d’agressions sexuelles. Et dans l’audition, on se rend compte que pénalement, il risque de ne pas y avoir suffisamment d’éléments pour caractériser le viol ou l’agression. C’est vraiment une zone grise, qui fait des dégâts psychologiques entre le sentiment d’avoir été victime d’une infraction pénale et la complexité pour un magistrat de qualifier la contrainte morale constitutive de ces infractions.
C’est la raison pour laquelle, on a voulu travailler sur le consentement avec des jeunes de 13 à 15 ans souvent l’âge des premières relations intimes pour leur faire comprendre qu’il faut se respecter soi-même et respecter l’autre.
C’est un sujet complexe, on voulait leur parler du consentement mais aussi leur situer ce que dit la loi ».
- Comment avez-vous élaboré votre action de sensibilisation des jeunes pour clarifier la notion de consentement ?
Karine Géron : « On a mis en place une séquence participative pour déconstruire les a priori, il y a des jeunes qui ont peur de dire non surtout quand la relation est formée depuis un certain temps. On ne peut pas attendre de l’autre qu’il valide notre consentement, si on ne l’a pas exprimé clairement, c’est vraiment l’objectif de expérimentation. Nous avons travaillé avec Axel Lattuada comédien, humoriste et youtubeur qui développe la série « Tout le monde s’en fout ».
Adjudante-cheffe Vergeade : « L’auteur a co-construit le contenu de la vidéo à partir des situations réelles des dépositions de plaintes rencontrées à la Maison de protection des familles. Sous forme d’humour et de manière très directe, il reprend toutes les situations où le consentement n’est pas clairement exprimé et les conséquences que cela entraîne».
- Comment se déroule une séquence ?
Karine Géron : « La séquence se passe en classe de collège en 4ème ou 3ème, 2 heures dans le cadre du plan EVARS avec moi et deux gendarmes en tenue et moi. Après une première diffusion en classe, nous reprenons la vidéo séquence par séquence. Comment on exprime un oui ou un non quand il y a des enjeux relationnels ? Que dit la loi sur le consentement ? A partir de quel moment, c’est un viol ? Comment se passe un dépôt de plainte ? Quels sont les impacts pour celui ou celle qui dépose plainte ? Pour celui ou celle qui est considéré(e) comme auteur de l’agression ? Qu’est que c’est d’être forcé ? Quel est l’impact de faire du chantage ou de la manipulation ? Mesurer l’impact du mensonge ; du passage en conseil de discipline ?
Les élèves participent, ils sont invités à décoder les situations. Le fait d’intervenir à 2 ou 3 intervenants permet d’être attentif au ressenti des élèves et de pouvoir nourrir les échanges. Le youtubeur insiste sur la question du « je » c’est de toi que tu dois parler et non pas pour l’autre »
En Vendée
La Maison des adolescents (MDA) accueille et reçoit tous les ados sur toutes les questions les concernant
Les centres de santé sexuelle (cegidd) des hôpitaux de Vendée (La Roche-sur-Yon, Montaigu, Challans, Les Sables d’Olonne, Fontenay-le-Comte) voire des hôpitaux des départements limitrophes La Rochelle, Niort, Cholet et Nantes. La carte des centres de santé sexuelle en Vendée
Le Planning familial sur rendez-vous ou sans rendez-vous le mercredi après midi.
La fondation Le Refuge accompagne des jeunes LGBTI+
Pour les personnes en situation de handicap : Cap Parent ; le Centre Ressources Intim’Agir Pays-de-la-Loire pour soutenir et accompagner les personnes en situation de handicap dans leur droit à une vie affective et sexuelle épanouie, ainsi que dans leur désir de fonder une famille.
La Boussole des jeunes sur les questions de santé.
Des ressources complémentaires
- Des vidéos :
- Des jeux sur les relations :
- Des jeux pour échanger en famille :
- Des ouvrages :
- Corps, amour, sexualité -Catalogue en ligne IREPS ORS Pays de la Loire (pour que les parents avec des réponses simples),
- Le consentement, on en parle ? -Catalogue en ligne IREPS ORS Pays de la Loire (pour les ados à partir de 14 ans)
- Des ressources en ligne pour les jeunes :
- Une série sur la sexualité à partir du collège :
- Un site d’informations sur les violences sexuelles :